HÄXAN, LA SORCELLERIE A TRAVERS LES ÂGES

HÄXAN, LA SORCELLERIE A TRAVERS LES ÂGES

FICHE TECHNIQUE

Titre français : La Sorcellerie à travers les Âges
Titre original : Häxan
Autres titres : Häxan: Witchcraft Through the Ages

Réalisateur : Benjamin Christensen
Année : 1922
Pays : Suède
Musique : Ludwig van Beethoven
Genre : Fantastique, documentaire
Interdiction : /

Casting
Benjamin Christensen (Le Diable)
Maren Pedersen (La sorcière)
Clara Pontoppidan (Une nonne)
Elith Pio (Le jeune inquisiteur)
John Andersen (Le chef inquisiteur)
Emmy Schønfeld (Marie)

Compagnie de production : Aljosha Production Company / Svensk Filmindustri

Première diffusion : 18 septembre 1922 (Suède)

Durée : 104 minutes


L'HISTOIRE
Le réalisateur Benjamin Christensen va nous proposer, en sept chapitres, un documentaire-fiction sur la sorcellerie à travers les siècles, et plus particulièrement sur la perception du Diable et des sorcières au Moyen-Âge. Durant cette sombre période de l'Histoire, plus de huit millions de personnes furent accusées de sorcellerie, torturées et brûlées, tombant sous le joug de la cruelle inquisition. Nous suivrons l'histoire de Karna, une vieille sorcière mais aussi d'une jeune femme qui pense que son mari a été ensorcelé et qui se rapproche d'un jeune inquisiteur, qui pense, à son tour, avoir été ensorcelé par la jeune femme...  

LA FIN DU FILM :
Benjamin Christensen parle de la perception de la sorcellerie à notre époque (les années 20) et met en avant les avancées dans la psychiatrie et les maladies mentales comme l'hystérie, maladies qui pouvaient conduire les gens à être pris pour des suppôts de Satan lors des siècles passés...

MON AVIS :
Réalisé la même année que Nosferatu le Vampire de Murnau, Häxan, connu également sous son titre français La Sorcellerie à travers les Âges, est un film à part puisqu'il s'agit avant tout d'un documentaire-fiction traitant de la sorcellerie, des sabbats, des sorcières et plus particulièrement de la chasse aux sorcières qui rythma l'époque du Moyen-Âge entre autre.

Film suédois dû à Benjamin Christensen, Häxan se compose de sept chapitres qui se veulent instructifs, érudits, historiques et intéressants. Le film dans son ensemble parvient très bien à assumer ses ambitions, malgré quelques raccourcis et approximations, et n'hésite pas à se montrer sans pitié envers le fanatisme et l'obscurantisme religieux, deux plaies universelles qui n'ont malheureusement pas disparues et se font même de plus en plus présentes en cette décennie 2010's. Ici, la religion visée est le Christianisme et il est bon de rappeler que les extrémistes catholiques n'avaient, à une certaine époque, rien à envier aux fanatiques de Daesh.

L'aspect documentaire est particulièrement présent dans le premier chapitre, puisque dans ce dernier, il n'y a aucune image filmée mais juste des images ou des représentations d'actes de sorcellerie, du Diable et de l'Enfer, commentées par le réalisateur lui-même, qui n'hésite d'ailleurs pas à interpeller à plusieurs reprises le spectateur au cours du film. Un premier chapitre thématique qui dénote avec le reste du métrage par cet approche purement documentaliste et scientifique, et qui pourra surprendre le spectateur s'attendant à voir un simple film d'épouvante sur des sorcières.

A partir du second chapitre, on bifurque dans l'univers cinématographique et Häxan se pare de superbes images nous plongeant dans le fantastique pur, nous présentant une vieille sorcière préparant potions et filtres d'amour à base d'ingrédients peu recommandables, ballets de sorcières virevoltantes dans le ciel sur leurs balais, apparition du Diable venant tourmenter les pauvres âmes en perdition ou participant à des sabbats frénétiques, accouchement multiple d'une sorcière donnant naissance à des enfants conçus avec quelques démons de passage, tentation d'une nonne par le Diable dans un couvent et j'en passe. Visuellement splendides, les images présentées aux spectateurs possèdent une force indéniable et Christensen à un sens de la mise en scène certain, aidé en cela par des effets-spéciaux (superposition, animation image par image...) et de maquillage très réussis.

Si la sorcellerie et ses représentations sont à l'honneur dans les premiers chapitres du film, Häxan devient ensuite, comme déjà évoqué, un vibrant réquisitoire contre les méfaits de l'Eglise et s'attarde à nous présenter la terrible Inquisition, à travers des scènes de chasse aux sorcières, de dénonciation, du procès hasardeux et de tortures diverses. Les procédés mis en place par les inquisiteurs pour faire avouer les pseudos-sorcières sont décrits complaisamment pour bien nous faire comprendre leur absurdité. Comme dit dans le film, le seul but de l'Inquisition est de faire avouer les victimes. Au vu des sévices et tortures prodigués, on comprend aisément que ces dernières finissent par avouer ce que leurs bourreaux veulent entendre pour mettre fin à leur supplices.

Häxan nous présente d'ailleurs certains instruments de tortures de l'époque médiévale et force est de constater qu'on n'a vraiment pas envie de les essayer ! Pince-doigts, ceinture ou anneau de cou pourvus de pointes acérées, table d'élongation des bras et des jambes, écrase-pied, broyeur de chevilles et autres raffinements sont mis en valeur et quand on sait que plusieurs millions d'innocents ont connu un véritable enfer au nom de la religion, ça fait froid dans le dos. On reste d'ailleurs bouche-bée quand une jolie jeune femme, pensant que son mari est ensorcelé, vient demander de l'aide à un jeune inquisiteur, qui en tombe amoureux. Refusant d'éprouver ce sentiment, il mettra ça sur le compte d'un envoûtement et dénoncera la malheureuse comme étant une sorcière ! Une aberration qui laisse pantois. Un carton-titre nous dit d'ailleurs "qu'il n'est pas bon être une femme vieille et laide, ni jeune et belle".

La fin du film évoque la sorcellerie telle qu'on la conçoit à l'époque de celui-ci (les années 20) et Christensen traite de la psychiatrie, rationalisant par la même occasion ce qui apparaissait comme démoniaque au Moyen-Âge. On sait par exemple que les inquisiteurs enfonçait une pointe dans le dos des personnes soupçonnées de sorcellerie et que certaines ne ressentaient aucune douleur, prouvant leur dévotion au Diable. La connaissance de la maladie de l'hystérie vient annihiler cette croyance comme l'explique la séquence dans laquelle un médecin fait le test d'époque sur une de ses patientes atteinte de ce trouble.

Oeuvre hors norme, somptueux livre d'images, implacable plaidoirie contre le sectarisme religieux, Häxan, La Sorcellerie à travers les Âges est assurément le film précurseur de toute la vague de longs métrages horrifiques mettant en scène l'Inquisition, du Grand Inquisiteur à La Marque du Diable entre autre. Si l'aspect documentaire, fort insistant tout de même, risque de déconcerter le spectateur, il n'en reste que les visions du Diable et des sabbats orgiaques, teintés d'érotisme, ainsi que les scènes traitant de l'Inquisition et de ses égarements, possèdent encore une puissance évocatrice et un style visuel qui en font un film muet majeur de cette décennie des 20's.

En 1968, le film fût remonté, raccourci à une durée de 77 minutes et commenté par William S. Burroughs.  

LA SCÈNE MARQUANTE :
La première apparition du Diable, superbement maquillé et interprété par le réalisateur lui-même.

CARACTÉRISTIQUES
- SCÉNARIO : 4/6
- VIOLENCE : 1/6
- GORE : 0/6
- NUDITÉ : 1/6
- APPRÉCIATION GLOBALE : 4/6


QUELQUES PHOTOS

 

 

 

 

 


LE FILM :

Disponible en double DVD chez POTEMKINE avec une version de 104 minutes, de 87 minutes et la version de 1968 racontée par William S. Burroughs

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